Gérard Le Gouic ne se livre pas à un panégyrique

Les éditions Diabase ont la bonne idée de publier des vies d’écrivains ou d’artistes.

Après Au pays de Bazaine et Au pays de Tristan Corbière sous les plumes respectives de Bernard Berrou et Catherine Urien, Gérard Le Gouic livre un Au pays de Georges Perros.

 

Poète, critique et pratiquant enthousiaste de littérature fragmentaire, dont les trois tomes de ses Papiers collés donnent un extraordinaire exemple, Georges Poulot, qui a pris le nom de plume de Perros pour ses sonorités plus « rugueuses » et plus bretonnes, quitte définitivement Paris pour Douarnenez au tournant des années 1960.

Il y a vécu plus mal que bien de lectures de manuscrits et de travaux d’écriture souvent ingrats qui volaient du temps à sa propre œuvre. Sa mort très prématurée, en janvier 1978, a contribué sans doute à faire découvrir à un assez vaste public ses ouvrages qui, de son vivant, ne sont pour la plupart connus que par quelques amateurs éclairés et quelques fervents.

 

Le propos de Gérard Le Gouic, lui-même poète et cadet de treize ans de Georges Perros, est de nous faire découvrir l’écrivain dans son microcosme douarneniste, élargi parfois à la région quimpéroise ou, même, à la ville de Brest où il dispensait à la Faculté des Lettres des cours qu’il appelait malicieusement «  d’ignorance ».

Ceux-ci consistaient surtout en lectures d’extraits de livres rares d’écrivains inconnus des étudiants dont il méprisait l’inculture.

 

Car Gérard Le Gouic ne se livre pas à un panégyrique : il présente Georges Perros dans la vérité qu’il a connue, celle d’un homme cachant son immense intelligence et sa vaste culture sous un tempérament bourru, caustique, avare d’amitié immédiate.

 

Si l’écrivain avait quelques amis fidèles, au nombre desquels le journaliste douarneniste René Pichavant, il ne faisait pas l’unanimité dans le port sardinier où il était rare dans les années 1960 et 1970 de voir un homme, sans travail véritablement défini, être suffisamment libre de son temps pour avoir le loisir d’aller chercher ses jeunes enfants à l’école.

 

C’est le mérite de Gérard Le Gouic de ne jamais dresser une statue mais de présenter un être humain dans sa vérité nue, loin parfois des souvenirs réels ou souvent inventés, que chacun a pu se faire du poète d’Une vie ordinaire.

 

Alain-Gabriel MONOT 24/01/2019