L’absence est la plus assourdissante des présences…

Eva-Jeanne Szlomowicz est née à Lublin le 12 mars 1922 et suivit sa famille dans son exil français. Elle vécut une première mort à vingt ans, mais « mourir à vingt ans n’empêche pas la survie. » : Eva disparut pour laisser place à Jeanne et passa sa vie à survivre.

 

Puis le jour où un Américain posait son pied sur la lune, une deuxième mort la consuma, l’enfant prit la décision de les quitter, l’enfant qui lui avait toujours dénié le titre de mère (« Tu n’es pas une mère comme il faut… Une mère doit juste être assez, partager la vie et passer le relais. »).

 

L’enfant devant son refus de répondre à ses interrogations sur son histoire, leur histoire, n’avait pu grandir, se construire. Déportée à Ravensbrück en 1944, Jeanne à son retour choisit le silence (« Elle avait tout de suite su, quand elle était revenue, qu’il y aurait deux catégories de rescapés : ceux qui parleraient et ceux qui se tairaient. »), impossible de décrire l’horreur absolue, avait ignoré sa fille « préférant » son entreprise de parfums.

 

Maintenant que Myriam n’est plus là physiquement, les souvenirs peuvent enfin percer, les fantômes reviennent et Jeanne peut mettre des mots sur son histoire, sur l’Histoire, et les tragédies multiples qui les accompagnent et qu’elle subit : un long dialogue avec la morte, car « ceux qui sont morts ne sont jamais partis… »

 

Une confidence douloureuse d’une femme qui survécut seule et qui ne pouvait que marquer la fin d’une trajectoire cristallisée.

 

Une écriture ciselée et épurée associée à une construction singulière et maîtrisée.

 

« L’absence est la plus assourdissante des présences… »

 

« Le passé devient fable quand il est récité, elle le sait, et se fier à sa mémoire est frôler l’imposture souvent. »

 

Max Buvry

Librairie Vaux Livres