« Le prophète Galiléen avance, libre par rapport à sa famille, aux pouvoirs, à Dieu même. Face aux pesanteurs traditionnelles et aux crispations identitaires, quelle libération, quel éveil ! »
Cette vigueur pour camper Jésus donne le ton de ce livre.
Gérard Bessière nous offre d’abord un vaste tableau des représentations de Jésus à travers les siècles et un point sur l’état actuel des recherches. L’auteur se situe lui-même dans cette lignée d’exégètes bibliques et de questionneurs du récit évangélique.
L’ouvrage s’en tiendrait à ce panorama qu’il serait déjà précieux.
Mais il va plus loin, ailleurs : il réussit le pari de passer par l’Histoire, par ces multiples représentations de Jésus et de l’en dégager en nous montrant la révolution permanente, le feu dont il est porteur. Il travaille à transmettre sa présence vivante et pose des questions radicales sur l’Église et les hommes d’église, la tradition :
« La vraie tradition n’est-elle pas de traduire, de recréer, de rénover en des contextes neufs ? », la foi « trop identifiée à des doctrines alors qu’elle est vie »…
Sa connaissance érudite est passée au tamis de l’expérience intime. Sans soumission aveugle, sans invective accusatrice, Gérard Bessière construit une route respectueuse, courageuse, ouverte. Par son regard qui sait être critique sans condamner, il permet au lecteur de faire sa propre appréciation.
Au long d’un cheminement paisible et passionnant, sa réflexion avance puis revient avec insistance vers les mêmes éléments, paroles et paraboles, les soumet à l’histoire et à l’art, les confronte à l’Église et au cœur des hommes, et se déploie ainsi en courbes ascendantes jusqu’à s’approcher de « l’abrupt du Mystère ».
L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit, traversant siècles et pouvoirs, de faire apparaitre l’ineffable, la « déflagration » d’un feu qui toujours bouscule et transforme. Derrière tant d’habits, où est l’unique visage ? Derrière tant de mots, où est le Verbe ?
Dans un message, il nous a confié : « Pour moi, ce livre est une parole testamentaire adressée à celles et à ceux avec qui j’ai cheminé et je chemine à travers la vie, et à celles et à ceux qui s’interrogent ».
Cypris Kophidès