Elle ferme les yeux.
Elle laisse le monde surgir et se recomposer en elle.
C’est comme une sève qui monte, une source qui jaillit.
Et elle commence à créer.
Chaque jour ou presque elle vole à l’aube ses lueurs. Et les couleurs et les formes coulent sur la toile, la laine, le cuir, le verre…
Quand elle ne peint pas, elle sculpte. La terre, le bronze, le cristal…
Des peintures, des sculptures, des dessins, des fresques d’une prodigieuse diversité – immenses, gigantesques, puissantes, ou miniatures, attendrissantes.
Elle crée avec ses mains, son corps entier, ses danses. Avec son regard intérieur. Ses émotions, ses rêves, ses souvenirs. Avec des éclats de lumière et de pénombre. En accueillant ce qui vient et qu’elle ne sait pas encore qu’elle porte en elle. Les enlacements de la vie et de la mort, de l’eau et du feu. L’odeur de l’herbe après l’orage, un soir d’enfance, seule. La course des nuages sur les vagues. Les échos des fracas du monde. Et la multiple splendeur du vivant.
Quand elle parle, c’est une houle, une cascade, traversée d’intuitions, de questionnements, d’idées. Entrecoupée par des salves de rire joyeux, libéré, libérateur.
Et, de temps à autres, par périodes, de plus en plus souvent maintenant, elle nous parle en silence. Elle écrit. Elle crée avec des mots.
Et la vie jaillit des pages blanches, dans sa plénitude, drue et âpre et douce à la fois. Ardente, avec ses joies et ses peines. Emplie de la saveur, de l’odeur et de la texture du monde. Et de la présence de l’autre, de tous les autres – l’homme aimé, les enfants, les parents, les amis… Emplie du lait de la tendresse humaine.
et s’aimer est le troisième livre de Lydie Arickx. Et, pour moi, le plus beau.
Un long et merveilleux poème. Un chant d’amour.
Un hymne à la vie. Et à ses éternels recommencements.
Jean Claude Ameisen