MON HÉROÏNE
107 × 177 mm, 128 pages
978-2-911438-15-9
10,00 €
Après avoir fait ses gammes avec Face à la mer, un premier livre incisif qui raconte la cavale d’un homme perdu, Yann Bourven évite les pièges d’un second rendez-vous avec ses lecteurs.
Plutôt que de se perdre dans une fiction où l’écrivain, masqué par ses mots et ses personnages, transparaît quoi qu’il arrive, il se met en scène, parle au “je” et se confie sur le processus créatif mêlé à la vie de l’écrivain.
Lors d’une nuit de vagabondage festif, Bourven – malgré le titre, c’est bien lui le héros du livre -, croise une jeune femme dans un bar et décide d’en faire le personnage principal du livre qu’il écrit et qui s’écrit en partie sous nos yeux.
Sa nouvelle égérie devient son amante, mais ne se montre guère passionnée. Le roman dans le roman doit pourtant s’écrire. Dans ce style très original qui mêle l’écrit à l’oral et qui fait ici sa patte, Yann Bourven répond aux questions concernant l’auteur et son oeuvre : Pourquoi écrire? Qu’est-ce qui alimente la création? Écrire est-ce s’arrêter de vivre? Son héroïne qui ne s’intéresse en rien à ces questions existentielles, reste muette sur le sujet, mais lui sert de révélateur. “Je ferai d’elle une histoire vraie”, croit naïvement Bourven héros de roman.
Une promesse écrite qui reste lettre morte : “J’avais beau cracher mes délires persos sur les feuillets, je savais que la création disparaîtrait […] oui messieurs dames, peut-être que je ne vous dérangerai plus avec mes livres horribles… car plus rien à prouver… juste vivre”.
Naïveté encore. Inventés ou tirés de la réalité, les oeuvres forcent l’écrivain occidental à sonder son âme pour en donner une clef codée aux lecteurs, non pour qu’il le perce à jour, mais pour qu’à leur tour, ils puisent en eux des raisons de s’interroger. “Pour moi, [écrire] c’est se refléter dans un miroir de mots”.
Yann Bourven délivre ainsi une somptueuse oeuvre d’art personnelle, susceptible de révéler à chacun son véritable visage.
Franck Mannoni